Allemagne (III)

Publié le par Christiane Piccini

Sabotage

 

Il y avait des équipes de nuit. La marchandise montait ou descendait en téléphérique. Un câble a été coupé, ce qui empêchait le fonctionnement de la fabrique de KALKWERK-LAGER à SALDER. Maurice était l’auteur de ce sabotage.

Les gardiens ont su que c’était Maurice. Ils l'ont arrête le 29 août 1944. J’étais paniquée, je pensais que je ne verrais plus le  père de mon enfant.

                                                             




Il a fait 92 jours de prison dans un camp disciplinaire dans la prison du village proche. La sommation venait du Tribunal de Braunschweig soit une amende de 163. RM.

Pendant ce temps,  un italien dans le camp me fit des propositions, quel affreux personnage !

Je lui tins tête et je racontais tout à Maurice lorsqu’il revint.

 

Pendant ma grossesse, le travail fut moins fatigant grâce au surveillant. Le gentil Meister m’appelait Léna (Hélène). Il me disait si tu es fatiguée tu t’arrêtes un peu. Il partageait son repas en deux et me le donnait en plus de ma ration journalière. Il pensait probablement à sa femme, ou sa fille. Il était bien attentionné à mon égard. Mon travail fut moins pénible. Je portais des tiges de fer coupées pour fabriquer le béton armé.


 
 

                                                   

Lorsque les neuf mois furent écoulés, je fus transférée au camp de WATENSTEDT en Allemagne pour accoucher parce qu’il y avait une pouponnière.

Dans ce camp, je constatais qu’il y avait des femmes françaises volontaires pour le travail en Allemagne.

J’ai su faire la différence entre travailleurs obligatoires et travailleurs volontaires.

La sage-femme qui m’accoucha était une polonaise qui avait pris la nationalité allemande.

L’accouchement fut long et pénible. Liliane est née en fin 1943 et elle pesait 4,600 kg. Liliane est le prénom d’une des sœurs à Maurice. Trente minute après l’accouchement « alerte ». Je suis descendue avec mon bébé à l’abri. Je suis restée six jours à l’infirmerie.

A la pouponnière, la nourriture était infecte on nous donnait une soupe à base de pomme de terre non épluchée et de rutabaga. Je dus retourner au camp de travail à SALDER : Kalkwerk-lager. Je pouvais allaiter Liliane le midi, je faisais donc 7 km aller et 7 km retour, en plus de mon travail journalier.

Fatiguée, je n’avais plus de lait. Les puéricultrices lui donnaient des biberons de lait coupé et de saccharine. Je suppose que c’était du lait.

Je n’allais plus la voir le midi, seulement le dimanche, jour de congé.

 

Le chef de camp qui avait giflé Maurice, lui fit une lettre de passage pour qu’il aille voir  Liliane avec moi le dimanche à la pouponnière.

Liliane maigrissait de jour en jour.

Elle est morte à 4 mois et demi en début de l’année1944.
Dans la pouponnière, les garçons étaient mieux nourris que les filles, certainement pour en faire des soldats.

 Fernand, notre ami, qui s’était proposé d’être le parrain de Liliane, essaya de nous réconforter du mieux possible. C’était un homme d’une grande bonté.

Prisonnier de guerre, il était mieux traité que nous les slaves et l’alimentation était meilleure. Il partageait sa nourriture et lorsqu’il recevait des colis il nous en donnait une partie.
Notre travail quotidien, fatigant, reprenait, nous n’avions aucune autre perspective en vue.

J’avais l’alliance au doigt et la chevalière qui était dans un mouchoir. Ces deux bagues me venaient de maman.

La chevalière a été échangée contre un pantalon et une chemise.

L’alliance contre du pain et du chocolat et des cigarettes.

L’alliance de maman a été abîmée dans la machine à bois lorsque j’ ai cassé mon doigt. Le tchèque devait me la redresser, il ne me l’a jamais rendu.

On entendait des rumeurs, les prisonniers disaient que les russes allaient venir nous libérer.

Ce sont les américains qui sont venus dans notre camp fin mars 1945.

 

La guerre était finie certes,  mais nous étions toujours enfermés dans ce camp.

 

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